vendredi 31 juillet 2009

héritage 1.0.1


collage réalisé pour la page de couverture du programme du Centre de Culture de l'abc, août 2009 :
hommage à Hannah Höch et Marta Rosler, savoir d'où je viens _ la culture POP et l'influence de mes lectures sur ma perception de l'ère du temps _

Comment faire du spectacle dans la société du spectacle ?
Création d’illustrations ludiques et réflexives pour la page de couverture du Journal du Centre de culture ABC.

Règles du jeu
• L’ABC sélectionne des illustrateurs/trices de la région, puis leur soumet des «règles du jeu», un contexte quelque peu contraignant ( !) et un délai.

Contexte artistique
L’ABC confiera le début de sa saison 2009-2010 à Jean-Michel Potiron et à son «théâtre à tout prix». Comédien et metteur en scène installé à Besançon, il monte de nombreuses pièces du répertoire jusqu’à ce qu’il «bute» sur la question insoluble: «Comment faire du spectacle dans la société du spectacle ?». Lecteur passionné de Guy Debord, de tous les auteurs, anciens et modernes, interrogeant l’essence de la culture, de l’art, de l’artiste, leur rôle dans le monde, leur rapport au social, au politique, à leur public, il conçoit ses derniers spectacles comme des illustrations de ce questionnement sans fin...
Ces préoccupations, à l’ABC, nous les partageons au point de programmer les trois spectacles que le «théâtre à tout prix» (www.theatreatoutprix.fr), a produit dans ce sens; d’offrir à cette compagnie nos espaces pour travailler à un quatrième spectacle; et de prolonger la réflexion durant toute la saison, par notre journal mensuel.

Références disponibles (voir en annexe)
A.- Deux citations de Philippe Dagen et de Antoni Tapiès extraites du spectacle Protesto ! B.- Quelques «critères premiers de discernement de l'Art» énoncés par Jean-Michel Potiron C.- Quelques autres citations plus brèves extraites de spectacles


Contrainte :
Répondre par une illustration à l’une des interrogations «potironniennes» suivantes:
• «Comment faire aujourd’hui un texte ou une image dans la société du spectacle?»
•« Qu’est-ce que l’art? »

NOTA BENE
l'illustrateur/trice s'engage à rendre son illustration dans les délais impartis et – pour varier l'exercice – prend connaissance des textes et images qui ont précédé son intervention.

ANNEXES
A.- CITATIONS
extraites de Protesto !

“En France /.../ s’est organisé un système de production et de consommation des loisirs qui n’a que faire d’une pensée libre, d’un acte gratuit, d’une oeuvre sans utilité immédiate. Ce système, parce qu’il a étendu son empire de plus en plus largement, n’a même plus besoin de combattre ses derniers adversaires : il ne leur oppose plus sa censure, il les nie par son indifférence. Selon l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), les activités du genre culturel se répartissent en deux catégories de produits : ceux qui relèvent du ‘‘récréatif’’ et ceux qui relèvent du ‘‘touristique’’. Il est difficile de ne pas penser que l’heure est à l’abaissement : une sorte de capitulation consentie, paisiblement ignoble. Et difficile de ne pas en déduire que le capitalisme mondialisé, c’est cela désormais : l’abdication de toute préoccupation intellectuelle et l’accord avec le monde tel qu’il est, du moment qu’il permet du profit et la défense – sinon le perfectionnement – de l’art de vivre occidental, prospérité et loisirs. Contraint de choisir entre une résistance vaincue d’avance et une collaboration profitable, nul n’est tenu de se mépriser au point de se prononcer pour la collaboration et le profit. Une oeuvre [qui] ne transmettrait sa colère qu’à deux ou trois hommes, dans la situation actuelle, il conviendrait d’y voir un triomphe et, presque, la promesse d’une épidémie de clairvoyance. Il ne reste qu’à parier sur l’apparition, de temps en temps, d’un nouveau foyer d’infection.”
PHILIPPE DAGEN (Chercheur, professeur d’histoire de l'art contemporain et écrivain français, il est chroniqueur au journal Le Monde)

“Je serai toujours opposé à tout avis nous enjoignant, de quelque façon que ce soit, de mettre notre langage à la portée du peuple. C’est le peuple qui doit se hausser à notre niveau. Et c’est l’affaire de tous de lutter pour lui donner les moyens de cette ascension. La majorité des gens serait en état de comprendre; malheureusement, il n’en est presque jamais ainsi. Et cette proposition n’est ni la faute de la majorité, ni celle de l’artiste, qui ne travaillerait que pour une ‘‘élite’’. Cette incompréhension n’est imputable qu’au fait que la majorité ne dispose pas des moyens de cultiver sa sensibilité. La société ne cesse de comploter contre l’éveil du plus grand nombre. Et l’artiste, multipliant les escarmouches contre cette sujétion, doit sans cesse inventer pour la briser, de nouvelles formes d’attaque. Le jour où existera une politique culturelle efficace et véritablement digne de ce nom, c’est- à-dire une politique qui mette au service de nos besoins actuels, du progrès et de l’enrichissement de notre esprit toutes les manifestations de la culture, anciennes et récentes, alors les artistes nouveaux cesseront d’être mal compris. Nous sommes horrifiés d’entendre les classes dominantes encore affirmer, avec une démagogie qui ne nous surprend plus, qu’il faut plutôt offrir au peuple des choses qui lui plaisent que trop d’intellectualité.”
ANTONI TAPIES (peintre catalan, également graveur, sculpteur et théoricien de l’art)

B.- «CRITERES PREMIERS DE DISCERNEMENT DE L'ART»
(choix parmi des «embrayeurs de débat» formulés par Jean-Michel Portiron)

1 - L’oeuvre d’art contient toujours quelque chose d’outré : une obscurité, un mystère, une monstruosité... On ne peut traduire l’intégralité d’une oeuvre d’art avec le langage des mots.
2 - Le but de l’art est de nous livrer l’accès à des univers inconnus.
3 - L’art est toujours une démarcation radicale du parler, du représenter, du figurer, du concevoir communs. L’art bat souvent en brèche la moralité courante. En ce sens, les artistes peuvent s’envisager comme des êtres à seconde vue.
4 - Expression d’une humeur, d’un mouvement, d’une idée stricto sensu personnelle, l’oeuvre d’art hermétique au contraire peut émaner d’un artiste songeant qu’il n’y a plus personne pour l’entendre.
5 - L’originalité de chaque artiste est infime. Elle se joue sur les marges.
6 - On peut distinguer entre les oeuvres fortes et les oeuvres faibles. Une oeuvre d’art (en peinture, en littérature, en musique, etc.) n’est pas équivalente à une bande dessinée. Shakespeare n’équivaut pas à Hergé.
7 - Le suprême degré de l’art, c’est la suggestion.
8 - La finalité d’une oeuvre d’art n’est pas nécessairement d’émouvoir.

9 - Sous une forme transposée, la production d’une oeuvre d’art est souvent une incitation à la désobéissance civile ou l’indice d’une incapacité à s’insérer dans la société normée.
10 - Il n’existe pas d’art neutre.
11 - L’oeuvre d’art est nécessairement savante. La production d’une oeuvre d’art est toujours le fruit de l’Histoire. Elle est donc toujours l’émanation d’un esprit de culture. Il n’existe pas d’art bête.
12 - L’oeuvre d’art aide à penser.
13 - L’art véritable lutte contre l’industrie du loisir et de la contemplation.
14 - Le facteur temps n’entre pas en ligne de compte dans la production d’une oeuvre d’art.
15 - La longueur d’une oeuvre ne garantit pas sa profondeur.

16 - Le succès qu’elle rencontre auprès du public non plus.
17 - Son aspect fini pas davantage.

18 - L’oeuvre d’art véritable n’opère pas de rupture avec le passé, elle n’est pas orientée uniquement vers le futur, elle n’est pas en prise exclusive avec le présent, elle ne se situe nulle part sur l’échelle du temps : elle est intemporelle.

C.- CITATIONS
extraites d’autres spectacles du THEATRE A TOUT PRIX

«Si mon théâtre pue c’est parce que l’autre sent bon.» Genet
«Perdre son temps. Gagner sa vie. Toutes les dérisions du vocabulaire.» Debord
«Une masse de poésie est normalement conservée dans le monde. Mais il n’y a nulle part les endroits, les moments, les gens pour la revivre, se la communiquer, en faire usage.» Debord
«Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation.» Debord
«L’information, c’est la poésie du pouvoir (la contre-poésie du maintien de l’ordre), c’est le truquage médiatisé de ce qui est.» Debord
«Représentez-vous l’incalculable somme de développement intellectuel que contient ce seul mot : tout le monde sait lire !» Hugo
«La poésie est une plante libre. Elle croît là où on ne la sème pas. Le poète n’est pas autre chose que le botaniste patient qui gravit les montagnes pour aller la cueillir.» Flaubert
«Une opinion très répandue veut qu’il y ait une énorme différence entre le fait d’apprendre et le fait de s’amuser. Apprendre, comme on nous a fait apprendre à l’école ou lors de notre formation professionnelle, etc., est indéniablement une chose pénible. Et pourtant, on peut étudier avec plaisir, il existe une étude gaie et combative.» Brecht
«Le problème, c’est qu’on a tellement privilégié le spectacle que c’est la pensée du spectacle qui s’est imposée et plus la pensée de la pensée. Les gens délèguent au cinéma ou à la télévision l’imagination ou la non- imagination de leur vie. Et puis après... bon, et bien c’est fini...» Godard
«Le spectateur n’est pas celui qui ne comprend pas. Le spectateur est celui qui comprend.» Pasolini
«Attendu qu’une nation peut se passer d’art, il serait beau même qu’elle en montrât la franchise...» Mallarmé





lundi 20 avril 2009

silence _


silence : mémoire / nancy babich. - Genève : HEAD, 2008.

jeudi 23 octobre 2008

déambulation _

"Tous les éléments pris n'importe où, peuvent faire l'objet de rapprochements nouveaux. Les découvertes de la poésie moderne sur la structure analogique de l'image démontrent qu'entre deux éléments d'origines aussi étrangères qu'il est possible, un rapport s'établit toujours. S'en tenir au cadre d'un arrangement personnel des mots ne relève que de la convention. L'interférence de deux mondes sentimentaux, la mise en présence de deux expressions indépendantes, dépassent leurs éléments primitifs pour donner une organisation synthétique d'une efficacité supérieure. Tout peut servir. Il va de soi que l'on peut non seulement corriger une oeuvre ou intégrer divers fragments d'oeuvres périmées dans une nouvelle, mais encore changer le sens de ces fragments et truquer de toutes les manières que l'on jugera bonnes ce que les imbéciles s'obstinent à nommer des citations.
...
Le besoin d'une langue secrète, de mots de passe, est inséparable d'une tendance au jeu. L'idée limite est que n'importe quel signe, n'importe quel vocable, est susceptible d'être converti en autre chose, voire son contraire."
in: In girum imus nocte et consumimur igni / Guy E. Debord